Notes

Alors c'était la troisième fois...

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Collectors parties

L’art des collectionneurs fait toujours l’objet d’expectatives les plus diverses. L’initiative d’expositions parallèles de deux collectionneurs Antoine de Galbert (Maison Rouge, Paris) et de Thomas Olbricht (Me Collectors, Berlin) nous rendent comptent de leurs choix. L’échange hormis d’être très judicieux et également très généreux. Il nous rappelle qu’une collection peut être dévoilée sans prétention aucune. Une collection est une démarche très personnelle qui évolue au fil du discours et de la cohérence qu’on souhaite lui donner. Le fait de l’enseigner au public témoigne d’un acte très personnel. Le public berlinois pourra donc apprécier des artistes français qui sortent des chemins habituels. Car la collection d’Antoine de Galbert est teintée d’ironie, de dérision qui rafraichit notre œil. Nous déambulons parmi des œuvres qui nous séduisent littéralement par leur poésie un temps soi peu dangereuse car frôlant une perspective politique. 
Tout du moins d’une dénonciation certaine. Les sculptures de requins posées sur des trépieds de Damien Deroubaix enseignent de l’équilibre circulaire précaire du concept de contrôle, le mur de vitres en verre brisé de Stéphane Thidet pourrait nous rappeler à la tension suivie de la fragilité des éléments nous entourant. Le collectif Claire Fontaine insiste sur des messages forts tels que la carte de la France composée d’allumettes prêtes à être brûlées ou bien encore le mot ‘Strike’ en néon à l’éclairage aléatoire. Caractère aléatoire comme pourraient l’être finalement toutes les grèves. Afin d’appréhender la mise en scène de Céleste Boursier-Mougenot, il nous faut rentrer dans une pièce où des guitares électriques, symbole de musique robuste, sont jouées à la guise par des oiseaux délicats.

En fait, si les œuvres présentées montrent en majorité une puissance, ce caractère est tout de suite effacé par la condition fragile qu’il s’en émane. On comprend l’ambivalence des situations et les métaphores que suggère chaque œuvre. La force se confronte constamment avec la subtilité.

L'intégration d'œuvres contemporaines dans la collection d'œuvres datées de la Renaissance au Baroque d'Olbricht facilite une redéfinition de l'art. Sa fonction originelle, celle qui dessert la religion, le culte aux saints et à la mort, fréquente ici l'humour. L'esthétique contemporaine reprend ces thématiques mais d'une façon détournée. Les animaux empaillés (Jackie Kayseur, Nicolas Darrot) prennent le contre pied d'une fatalité. Par là même, ils en deviennent ludiques, charmants.

Les œuvres marquent un engagement dans le discours. Les idées sont abouties, franches et nous laissent réfléchir librement. « My Paris » est une sélection de 25 années d'une collection qui s’éloigne de tous les artistes à la mode, synonymes d’éphémères. Cette collection reflète une fidélité à des coups de cœurs. C’est une succession de convictions en des artistes. Elle se joue et se déjoue des courants pour enseigner une personnalité forte. Le collectionneur est ici intuitif et témoigne de ses recherches. Dans sa composition, il devient lui-même un artiste.
Il nous reste à découvrir l’exposition « Mémoires du futur » de la collection Thomas Olbricht qui nous dévoilera sans aucun doute une vision ample, un exercice de style marqué au sein même de l’histoire de l’art. 
Oct.11
E.G.
My Paris, Collection Antoine de Galbert 
01 octobre 2011 – 08 janvier 2012

Mémoires du futur, la collection Olbricht 
22 octobre 2011 - 15 janvier 2012